Parle-nous un peu de toi !
Je suis Sharon, j’ai 43 ans, je suis israélienne, et je suis arrivée à Paris après avoir quitté mon travail pour le gouvernement (j’ai un diplôme de psychologie et criminologie, et un autre en droit). J’ai décidé de tout quitter pour réaliser mon rêve : la pâtisserie. J’avais déjà suivi des études de pâtisserie en Israël, avec le MOF Olivier Bajard, mais cette dernière s'avère très différente de celle en France (elle est plus proche de la pâtisserie de l’Est de l’Europe) donc j’ai pris une valise, comme dans les films, et je suis arrivée à Paris sans argent, sans famille, sans rien !
Qu’as-tu fais une fois arrivée en France ?
J’ai d'abord travaillé à l’ambassade d’Israël le matin pour avoir mes papiers et un salaire minimum pour vivre. L’après-midi, j'allais voir des pâtissiers, des chocolatiers etc. pour faire connaître la pâtisserie française aux israéliens via mon blog, mais ces professionnels ne comprenaient pas pourquoi je venais vers eux ! Instagram n’existait pas encore, Facebook commençait tout juste, et les pâtissiers cuisinaient pour leurs clients proches, pas pour un pays lointain comme Israël !
Au début, il n’y avait que ma famille et quelques amis qui s’intéressaient à mon blog (rires), puis j’ai fait le buzz, car j’étais la première à faire connaître la pâtisserie française en Israël. J’ai été contactée par des journaux très connus là-bas, pour écrire des articles sur la pâtisserie française. J’ai réussi à créer un marché qui n’existait pas. J’ai par la suite écrit le premier guide en hébreu des meilleurs pâtisseries et chocolateries de Paris, qui a été un Best seller. Je recevais de plus en plus de messages de personnes qui voulaient savoir où aller dans Paris pour déguster de bonnes choses. Et c’est comme ça que sont nés les circuits culinaires.
J’ai réussi à avoir mon passeport européen, car ma famille vient de Hongrie et de Roumanie. J’ai donc pu quitter l’ambassade pour me concentrer sur mon business. Un jour, il y a 7 ans, une jeune femme israélienne nommée Gali, en voyage à Paris, est arrivée chez moi à l'occasion d'un circuit culinaire. On a parlé et je lui ai expliqué que je voulais repartir en Israël, trouver un homme, me marier… Elle m’a dit que j’avais fait ce dont elle avait toujours rêvé : vivre à Paris. Nous sommes restées en contact, et nous sommes tombées amoureuses. Elle a déménagé à Paris il y a 6 ans maintenant et nous nous occupons dorénavant toutes les deux des circuits culinaires.
Et les vidéos backstage en pâtisserie, comment ça a commencé ?
J’ai débuté sur Instagram comme tout le monde, en postant des photos de ce que j’aimais et des pâtisseries que j’achetais ou que je recevais. Puis j’ai réalisé que les gens auraient aimé comprendre "les dessous de fabrication", mais peu de personnes étaient autorisées à connaître ces précieux secrets. La première vidéo que j’ai publiée concernait le Salon du Chocolat pour Insider, et elle a été vue 50M de fois. C’était fou ! Alors j’ai continué. Et maintenant je suis invitée chez les plus grands chefs pour filmer des vidéos backstage.
Comment t’était venue cette envie de tout quitter ?
En Israël, il n’y a pas la même façon de vivre. En France, on va souvent au restaurant, on achète des pâtisseries au coin de la rue… C'est naturel. En Israël, tout se passe à la maison, la cuisine n’est pas vue comme un véritable métier. On va au restaurant pour célébrer un événement important, mais c’est tout.
Dans ma famille, on cuisinait beaucoup, je réalisais pleins de pâtisseries et j’ai toujours aimé manger : c’est pour ça que je dois beaucoup courir (rires) ! C'était pour moi le moyen de faire plaisir à ma famille, mes amis ou mes collègues.
Qui sont les personnes qui t’ont le plus inspirée pendant ton parcours ?
Mes deux grands-mères ! Elle concoctaient de très bons gâteaux, et m'ont donné goût à la pâtisserie. Aujourd’hui, je dirais que c’est mon ami Pierre Hermé. Il fait de très grandes choses pour faire évoluer le monde de la pâtisserie moderne. C’est un modèle et un mentor pour beaucoup de chefs, mais il reste une personne très humble, discrète et calme, qui garde les pieds sur terre malgré son succès.
Quelles sont les activités qui constituent ton métier aujourd’hui ?
Je m'occupe des circuits culinaires avec Gali, où l’on fait découvrir aux touristes des histoires sur Paris, sa culture gastronomique et bien sûr les backstages. Je suis également journaliste, j’écris des articles pour Fou de Pâtisserie, pour des journaux en Israël. J’ai aussi mon blog et mon compte Instagram avec des vidéos.
Tu t’attendais à ce parcours quand tu es arrivée à Paris ?
Non, pas du tout ! Quand je suis arrivée à Paris avec ma valise je n’avais pas idée que je pourrais faire autant de choses, et que je pourrais vivre mon rêve. Être une étrangère à Paris n’est pas facile... c’est vraiment une grande aventure, qui j’espère ne s’arrêtera jamais. Je vis mes rêves, et grâce à eux j’ai trouvé ma femme, donc c’est génial !
Une journée avec Sharon à Paris, ça donne quoi ?
Je me réveille et je regarde mon portable pour savoir si j’ai reçu des mails, messages sur Instagram, Facebook, WhatsApp… Quand tu es indépendant, c’est toi qui fais tout ! Ensuite je vais courir (je cours environ 5 fois par semaine pour garder la ligne, le moral et la santé). Je poste le « choix du matin » sur Instagram, grâce à Gali qui sort chercher les viennoiseries et les cafés pendant que je cours (rires). Ensuite on s’occupe des circuits culinaires (que l'on fait ensemble ou séparément) Je vais également à mes rendez-vous pour filmer les vidéos, les interviews… On a toujours des journées très remplies, surtout pour les périodes de Noël et Pâques car il y a beaucoup à faire. Le soir on cuisine chez nous, souvent de la salade avec du tahini (rires). Pendant les vacances et voyages, il faut allier loisirs et travail, mais j’adore ça ! J'adore ce mélange, cet équilibre entre le personnel et le professionnel.
Où vas-tu ... Pour un dîner romantique ?
Chez David Toutain
(Paris 7ème), car c’est un chef très talentueux, avec une vision artistique. J’aime beaucoup ce qu’il fait.
... Pour une soirée entre amis ?
Comme on est toute la journée dans les restaurants, on aime bien se réunir à la maison le soir, ou dans des endroits sympas comme les bistrots Paul Bert, Au Passage ou le Clown Bar
(Paris 11ème).
Quel est le TOP 3 de tes adresses préférées à Paris ?
C’est difficile de faire un choix, mais je dirais Carl Marletti
(Paris 5ème), la fromagerie de Laurent Dubois
(Paris 4ème), et la boulangerie Utopie
(Paris 11ème).
Ta dernière découverte parisienne ?
Pour faire honneur à Israël, je dirais le restaurant de Assaf Granit : Shabour
(Paris 2ème) !
Quelle est l’expérience food la plus marquante que tu aies eu à Paris ?
Je dirais le Tea Time dans un Palace. Je conseille vraiment à tout les gourmets de vivre au moins une fois cette expérience magnifique (et ce n’est pas aussi cher que l’on croit). Si vous ne savez pas où aller, je conseille le Plaza Athénée
(Paris 8ème)pour le petit-déjeuner, le Meurice
(Paris 1er)et le Bristol
(Paris 8ème) pour les pâtisseries, et le Ritz
(Paris 1er)pour le Tea-Time (pour goûter les madeleines et biscuits dans le Salon Proust).
Quels sont tes petits plaisirs coupables ?
J’adore les mikados… Et le pain complet tartiné de Nutella.
Les Do’s and Don’t de la Pâtisserie ?
Don’t - Les colorants dans la pâtisserie : j’aime pouvoir voir la vraie couleur des ingrédients, sans qu’elle soit cachée par des colorants, naturels ou non. Je pense notamment à Claire Darmon qui en utilise très peu, j’aime beaucoup regarder sa vitrine.
Do’s - Travailler des produits de saison. C’est quelque chose que les pâtissiers français font de plus en plus et c’est très important.
Quelles sont les prochaines tendances dans le domaine culinaire ?
Selon moi, avec les tendances actuelles, la pâtisserie végétale va beaucoup se développer. Comme par exemple Pierre Hermé qui a fait une collaboration avec la Maison du Chocolat, pour créer des pâtisseries végétales et sans gluten. C’est très important de s’en préoccuper. Il y aura aussi moins de sucre à l’avenir, car c’est un très gros problème aujourd’hui.
Quelle est la destination la plus inspirante selon toi ?
Le Japon car c’est le royaume culinaire de notre temps. Et Tel Aviv : pour moi c’est un endroit qui emprunte beaucoup aux cuisines du monde entier, les mélange et crée quelque chose d’incroyable. C’est pour cette raison que la cuisine israélienne est très appréciée partout dans le monde, notamment à Paris !
Vous pouvez retrouver Sharon sur les réseaux @parischezsharon et suivre ses actualités bien gourmandes.
